Une histoire de road trip à la découverte des villages blancs
Si le diable s’habille en Prada, au printemps l’Andalousie s’habille plutôt de vert. Et chose particulièrement étonnante dans cette région d’Espagne réputée aride et sèche : à cette époque la nature exulte de diversité et de couleurs. Partons ensemble en voyage dans la sierra de Grazalema et partageons une belle histoire de road trip à la découverte des villages blancs. Je vous propose de découvrir une Andalousie verte, à la fois surprenante, délicate et secrète.
Quand l’Andalousie s’habille en printemps
La dernière fois que je suis venu en Andalousie, j’avais découvert une terre brûlée, rongée par le soleil et la sècheresse. Les paysages s’y dévoilaient en jaune paille, nankin et blond. Le long de la route, je n’apercevais que d’immenses étendues désertiques à perte de vue. Au volant, un sentiment de solitude me prenait au ventre, puis à la tête, comme une ivresse, un vertige.
Lorsque je suis retourné en Andalousie au début du printemps, j’ai mis les pieds dans un tout autre monde. Comme si une province entière de l’Espagne s’était métamorphosée sans que le monde (en tout cas mon petit monde) n’en soit informé. En contournant Ronda par la route de Olvera, j’ai découvert une Andalousie verte et sauvage absolument sublime. Pour tout vous dire, j’ai à peine reconnu ces paysages que j’avais pourtant traversés 3 ans plus tôt. Comme quoi parfois, il est bon de revenir plusieurs fois au même endroit, plutôt que de courir à travers le monde pour ajouter un nouveau pays à sa to do list.
C’est ce voyage que je vous raconte aujourd’hui dans ce carnet. L’histoire d’un road trip dans les villages blancs d’Andalousie qui vous mènera de Ronda à Grazalema, de Zahara de la Sierra à Benaocaz, de Setenil de las Bodegas à Arcos de la Frontera.
1.
Zahara de la Sierra : une image de l’Andalousie idéale
Blotti au pied du mont Jarral à 500 mètres d’altitude, Zahara de la Sierra est un de ces villages blancs que l’on oublie jamais, si un jour on a la chance de croiser sa route. Le village tout entier est un rêve, une représentation parfaite et idéale de l’Andalousie, celle que je vois dans mes songes, que je m’imaginais avant même d’arriver.
Ce village de caractère m’offre un balcon fantastique sur le lac de Zahara-El Gastor. Enfin un réservoir plutôt, car il n’a rien de naturel, mais qu’importe. Je me laisse emporter par ces couleurs éclatantes : le vert turquoise de ses eaux permet aux montagnes alentours d’exploser en une déclinaison de jaunes, d’oranges et de teintes rougeoyantes. Le genre de paysage à faire littéralement dérailler le déclencheur de ton appareil photo.
Nous grimpons les ruelles de la ville médiévale. A la croisée des mondes chrétiens et musulmans, Zahara rappelle par certains de ses traits les médinas du maghreb. Au sommet de la montagne, subsistent toujours les ruines de l’ancien château mauresque, témoin de l’histoire tumultueuse de la région.
2.
Zahara de la Sierra : la star des villages blancs andalous
Grazalema : la reine des montagnes
En fin d’après-midi, j’ai pris la route pour Grazalema, un village encaissé sur les flancs de la Sierra del Endrinal. Pour le rejoindre, j’ai emprunté la route de montagne qui passe par Puerto de Las Palomas. Cette carretera spectaculaire s’envole à près de 1200 mètres d’altitude, emportant avec elle quelques-uns des plus beaux panoramas que l’Andalousie est à offrir.
Le paysage karstique au coeur duquel je me trouve est la région la plus arrosée d’Andalousie. Ici, le vert est éclatant et la nature généreuse et abondante. J’oublierais presque que je suis dans le sud de l’Espagne. Je viens de traverser une épaisse forêt de sapins aux allures alpines et me voici plongeant vers le plus beau village blanc d’Andalousie : Grazalema.
3.
Vue panoramique de Grazamela
Ronda et ses autocars de touristes asiatiques
Ronda sur son promontoire perché est toujours aussi impressionnante. Et les visiteurs ne s’y trompent pas, toujours aussi nombreux à visiter la plus ancienne ville d’Andalousie. A l’entrée de la ville stationnent des centaines de bus qui accompagnent les touristes asiatiques dans leur tour d’Andalousie. Sur le Pont Neuf, la foule est compacte. Mais qui ici se souvient de l’histoire tragique de ce pont, duquel furent précipités 512 nationalistes durant la guerre civile.
Ronda, cette ville qui coupe le souffle, fut la muse de nombreux artistes et écrivains, d’Orson Welles à Hemingway, en passant par James Joyce. Posté au pied de la falaise en contrebas du pont, je comprends pourquoi. Ce panorama est tellement grandiose qu’il te happe, t’absorbe comme un aimant, te fait battre le coeur fort, très fort…
4.
Ronda et le pont neuf
Emporté par la foule à Setenil de las Bodegas
J’ai quitté rapidement Ronda pour rejoindre Setenil de las Bodegas par la route de Arriate. Ce fascinant village aux origines romaines fut d’abord l’un des fiefs des musulmans dans la région. Ils y édifièrent la forteresse imprenable de Xatanil qui ne plia qu’au septième assaut des troupes catholiques en 1484.
Aujourd’hui, ce sont plutôt des assauts de la foule que Setenil de las Bodegas est victime. Nous ne sommes pourtant qu’au mois de mars, mais c’est aussi l’un des premiers week-ends ensoleillé de l’année. Alors il y a foule sous les cuevas creusées au fil des millénaires par le Guadalporcún. Peu après la bar Zamudio, à l’entrée des gorges, la route prend brusquement de la hauteur au terme de deux lacets assez serrés. Se dévoile alors un panorama tout à fait somptueux sur le village et un point de vue parfait sur le Torreon del Homenaje. Pour moi, c’est ici que se joue tout le spectacle de la ville, bien plus que dans les allées engorgées qui mènent aux boutiques troglodytes…
5.
Maisons troglodytes et panorama à Setenil
Mais où sont passés les habitants de Olvera ?
Olvera figure sur tous les itinéraires de découverte des villages blancs. Mais ce que les guides oublient souvent de dire, c’est que Olvera n’est pas un village mais une ville. Il est vrai que dressé sur son éperon rocheux, Olvera a de la gueule. Le panorama qu’elle offre sur les montagnes de Guadix est impressionnant. Oui mais voilà, le charme n’opère pas, il manque quelque-chose à cette cité. Une vie peut-être, une ambiance, des gens…
En ce soir de mars, les rues de Olvera apparaissent désespérément vides. Il est 19 heures et la plupart des boutiques ont tiré leur révérence. Dans la Calle Llana qui mène vers la mairie et l’église de Nuestra Señora de la Encarnación, on n’entend guère que le bruit de nos pas. Je grimpe 4 à 4 les escaliers qui mènent sur le parvis de l’église. Ce dernier permet d’apprécier avec plus de hauteur le labyrinthe que forment les ruelles étroites et piétonnes de la vieille ville. Je n’ai croisé personne ce soir là, sauf deux petites filles qui jouaient dans la rue, sous le regard de leur grand-mère penchée par la fenêtre…
6.
A la posada de Benaocaz
Benaocaz n’est pas le plus beau village de la sierra de Grazalema. Mais il est adossé à une immense paroi rocheuse impressionnante, à l’entrée du parc naturel. Le panorama y est particulièrement spectaculaire et évoque certaines vallées pyrénéennes. Evidemment, il faut faire abstraction de la végétation composée il vrai de quelques conifères, mais aussi et surtout de chênes verts. Dans ce repère de randonneur, il existe une petite posada, El Parral, tenue par un couple de jeunes andalous. J’y passerai la nuit.
Je dors dans une petite chambre cosy au deuxième étage. L’aménagement est sommaire mais l’atmosphère vraiment apaisante. Le soir au restaurant, le chef prépare une cuisine exquise et tout à fait inhabituelle en Espagne. Goûtez les truffes au chocolat, elles sont divines…
Le lendemain, je longe les falaises impressionnantes de la sierra de Caillo, jusqu’au minuscule village blanc de Villaluenga del Rosario. Quelle beauté ! Pourtant, aucun de mes guides ne fait mention de ce lieu. Il constitue pourtant une étape toute trouvée pour prendre un café, avant d’engager son road trip sur la célèbre route A372, qui file vers El Bosque à travers les montagnes…
7.
La sierra de Grazalema
Perché sur la falaise d’Arcos de la Frontera
J’ai terminé ce road trip à travers l’Andalousie verte à Arcos de la Frontera, cité grandiose de la province de Cadix. Perchée au bord d’un fabuleux précipice creusé par le río Guadalete, Arcos de la Frontera impressionne par sa beauté, mais aussi par ses talents de funambule. Au-dessus du vide, elle se joue totalement du vertige et de la hauteur.
Au coeur d’un labyrinthe de ruelles pavées, comme les andalous en sont décidément friands, je croise le chemin de superbes demeures baroques et d’églises gothiques. Chaque balcon sur la vallée est un enchantement. Mais on le sent déjà, l’été ici se doit être une véritable cohue, alors croyez moi quand je vous dis que l’Andalousie sera toujours plus belle au printemps…
8.
Arcos de la Frontera
A lire pour continuer à voyager en Andalousie
- Un itinéraire de road trip sur l’autre route des villages blancs ;
- Un séjour à Séville sans flamenco ni toréro
1 Comment
PETIT
19 août 2023 @ 5:47
Merci pour ce récit intéressant qui nous transporte dans une nature et une architecture grandiose mais quel dommage l’absence d’une carte géographique qui permettrait de repérer les villages cités et faciliterait une idée du parcours à envisager en road trip !.. A méditer….