Au sud du Sri Lanka, la côté dévoile une multitude de plages et de petits villages de pêcheurs, après Mirissa et Tangalle, retour sur notre passage à Talalla (mon coup de coeur dans le sud) et dans la ville côtière de Matara.
Talalla, petit bijou de la côte sud du Sri Lanka
Nous avions commandé un bajaj à Tangalle, qui nous déposa dans un hôtel surplombant la plage à l’ouest de la baie de Talalla. Ce n’était pas l’adresse convenue au départ, mais l’endroit nous plu tellement qu’on décida d’y rester. Je n’appréciais pas du tout les façons de faire des conducteurs de triporteurs. Les systèmes de bakchichs étaient courants et permettaient aux chauffeurs de se faire un petit revenu supplémentaire. Le deal était simple, si un hôtelier voulait être sûr qu’on lui ramène des clients, il devait s’acquitter d’une somme parfois confortable, auprès du chauffeur qui déposait des passagers dans son établissement. Le propriétaire de l’hôtel Panorama nous confia avoir dû payer mille roupies, s’il ne voulait pas nous voir repartir. S’il refusait, le chauffeur risquait de ne plus conduire personne chez lui et de faire passer le mot à ses collègues. C’était comme cela que les affaires fonctionnaient au Sri Lanka. Dans la montée tortueuse qui menait à l’hôtel Panorama, le chauffeur s’était arrêté quelques dizaines de mètres en bas et était monté à la réception. Il revenait quelques minutes plus tard. « C’est la bonne adresse ici, venez voir ! ». Et nous l’avions suivi sans rien soupçonner du manège qui venait de s’opérer sur notre compte.
« Regarde cette vue ! » me dit Brice. De toutes les plages du sud, celle de Talalla était certainement la plus impressionnante. Deux kilomètres de sable dans une anse bordée d’arbres tropicaux. Quelques bateaux de pêcheurs, des jeunes qui s’amusaient dans les vagues, deux ou trois pensions planquées dans la végétation. Rien de plus.
Le soir sur la falaise
Une femme blonde d’une soixantaine d’année était installée sur une petite chaise au bord de la falaise, près de la piscine. Elle regardait le coucher du soleil sur Talalla. Le soleil rouge et gigantesque disparaissait lentement derrière les rangées de cocotiers, dans un ciel orangé. La brume remontait doucement de la mer et envahissait progressivement la plage.
– Vous logez ici ? Nous dit-elle. Nous nous sommes vus au café de l’autre côté de la plage, vous vous souvenez ? La vue est incroyable n’est-ce pas !
– Oui, c’est vraiment superbe, il n’y a rien à part le sable et la mer.
– On m’a dit que la municipalité avait interdit toute construction à moins de cent mètres de la plage. C’est pour cela qu’il n’y a rien. Je loge à l’autre bout, mais le soir je viens ici profiter du spectacle.
Elle était arrivée depuis une semaine dans une petite pension à l’opposé, mais chaque soir elle restait prendre un verre face à la mer, perchée sur la falaise jusqu’à la tombée de la nuit. Je la trouvais vraiment étrange, elle semblait tout droit sortie d’un roman policier. Une femme seule, exilée, qui venait certainement de tuer son mari et avait du partir quelques temps se mettre au vert.
L’hôtel Panorama avait lui aussi un côté mystérieux, mais pas autant que ses propriétaires. Il était tenu par un couple venu de République Tchèque. Le maître de maison avait une allure de mafieux, même s’il me paraissait fort sympathique. Je ne pouvais m’empêcher de croire qu’il avait trempé dans quelques magouilles au pays. Prostitution, trafic de drogues et vente d’armes probablement. Sa fortune ainsi amassée, il avait investi à Talalla pour se faire une place au soleil…
Soleil d’enfer sur Matara
Nous prîmes place à bord d’un vieux tata rouge qui faisait la liaison jusqu’à Matara. Nous n’étions pas encore installés dans nos sièges, que le véhicule avait déjà atteint sa vitesse de pointe, doublant voitures et triporteurs en klaxonnant à tout bout de champ. Tous les passagers paraissaient détendus, à l’exception de nous deux. Brice me regardait filmer ce moment avec un sourire crispé, tout en agrippant fermement le dossier juste devant lui. Une musique indienne très rythmée était diffusée à pleine puissance. J’aurais presque pu me lever et danser, mais j’aurais certainement fini dans le décor en moins de deux. Comment cette vieille carlingue faisait-elle pour avancer si vite, et où donc son chauffeur avait-il suivi sa formation ? Un pilote, c’est ça ! Il se prenait de toute évidence pour un pilote de course. Tout l’avant du bus avait été complètement décoré d’une foule d’objets et d’une collection de statuettes kitsch à souhait. Il y avait bien entendu un collier de fleurs, suspendu au rétroviseur, sensé protéger le véhicule et ses passagers de toutes les mésaventures, à commencer par les accidents. Au niveau du plafond, sept représentations de divinités hindoues, installées sous de petites arcades, protégeaient également le bus. Des écritures en tamoul clignotaient sur un petit écran à diodes vertes. Le véhicule semblait avancer de plus en plus vite, si bien que tous les sièges en tremblaient. Fort heureusement pour nous, le trajet dura à peine vingt minutes. Le bus nous déposa sur la route de la plage, non loin de la passerelle qui menait au Parevi Duwa.
Matara permet un aperçu de la vie quotidienne des sri-lankais. Son fort hollandais et ses rues très animées constituent son principal attrait…
Quatorze heures. Une chape de plomb. Personne dans les rues. Quelques badauds et de jeunes couples abrités sous des ombrelles, le long de la promenade du front de mer. Les petites rues qui menaient au pont, sur la Nilwala Ganga, étaient désertes et les quelques boutiques du coin avaient baissé le rideau. Sur l’autre rive la foule était bien là, mais dans une animation qui tenait plus de la frénésie que d’autre chose. Nous trouvâmes refuge dans un supermarché de Kumarathunga Street, où l’on pu se rafraîchir et acheter une petite réserve d’épices. Nous n’avions même plus le courage de nous traîner jusqu’au fort hollandais et nous échouions dans une petite boulangerie, histoire de fuir encore le soleil.
Le Parevi Duwa abrite un petit temple bouddhiste desservi par un élégant pont en acier
Seize heures. Il faisait tellement chaud que le moindre mouvement devenait insupportable. Le soleil nous brûlait lentement la peau et nos fringues nous collaient au corps, tellement nous étions trempés de sueur. Nous atteignîmes tout de même la passerelle suspendue qui menait à un curieux petit temple, perché sur une minuscule île rocailleuse. Le pont était parfaitement aligné à l’entrée de l’édifice et au toit de la première pagode, si bien qu’on aurait pu croire qu’ils avaient été construit à la même époque. Il n’y avait rien de particulier à l’intérieur et nous ne mîmes pas plus de cinq minutes pour faire le tour de l’île.
Il n’en fallut pas plus pour nous faire repartir, pour regagner au plus vite notre rocher, sur les hauteurs de Talalla.
4 Comments
laura
3 juin 2016 @ 8:41
Ah les bus tata c’est sur que c’est une sacré expérience ! Faut s’accrocher et attention aux courbatures si ça dure trop longtemps.
Petits Voyageurs
7 juin 2016 @ 3:49
C’est clair que ça bouge pas mal là-dedans, de vrais pilotes ! En même temps, vu qu’ils sont payés au nombre de courses par jour, on peut les comprendre !
Mitchka
4 juin 2016 @ 5:29
bon mais est ce que tu as fait des recherches ? la femme blond a t elle vraiment tué son mari ? avec l’aide du patron de l’hôtel peut-être …? tu tiens le début d’un polar en tout cas 🙂
Petits Voyageurs
7 juin 2016 @ 3:47
Et malheureusement je n’en sais pas plus pour le moment. Si je retourne au Sri Lanka, je ne manquerais pas d’aller faire un tour au Panorama, histoire de voir si ces deux-là traînent toujours dans le coin…