Un matin j’ai vu les éléphants d’Uda Walawe

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J’étais installé sur la terrasse en bois de notre bungalow, au milieu d’un jardin tropical qui donnait sur l’océan Indien. Je tentais de reprendre l’écriture de mon journal après plusieurs jours d’arrêt. L’inspiration ne venait plus. Trop de choses à raconter, trop d’images à trier, trop de sentiments qui m’assaillaient et se mélangeaient dans ma tête. La peau de mon torse se remettait doucement des brûlures du soleil et du sel. Elle était encore rouge et sensible, mais elle ne tiraillait plus. La douleur au niveau de mes hanches avait progressivement disparue et mon nez commençait à peler.

Nous étions en villégiature dans un petit hôtel à l’est de Tangalle, que l’on avait choisi pour ses petites maisons en bois octogonales qui donnaient sur une crique tranquille, à l’abri des foules. On adorait se prélasser dans ses curieuses chaises longues en bois, dites kursi bogang, dont les accoudoirs étaient prolongés par des planches amovibles, sur lesquelles on pouvait laisser reposer les jambes.

plage de tangalle sri lanka

Le midi, nous nous étions rendus dans une petite hutte en bois sur pilotis au milieu de la plage. Nous nous installâmes sous le toit en palme tressée, autour d’une table en plastique recouverte d’une nappe rouge aux motifs printaniers. Des fleurs de tiare bien mal reproduites, à la façon des toiles cirées de nos grand-mères. Il n’y avait pas de carte pour commander à manger, le vieux bonhomme qui tenait l’affaire nous présenta un plateau sur lequel on choisit deux poissons et des crevettes. « Je vous les prépare avec une sauce au curry ! ». Dix minutes plus tard, les poissons étaient là, grillés à point et recouverts d’une sauce maison avec des petits oignons, du piment et de la citronnelle. Plus besoin d’être à la table d’un grand restaurant pour se croire au paradis. Bien entendu, nous jouâmes aux cartes pendant quelques heures. Au fur et à mesure des parties, une petite compétition s’était installée entre nous, si bien qu’on ne pouvait plus décrocher.

Conversation avec des paons

Dans l’après-midi, nous partîmes en balade dans une forêt de palmiers au-dessus de la plage. Un petit chemin menait jusqu’à un bois d’où s’élevaient des cris étranges. Des sons d’oiseaux probablement, très aigus, comme une alarme qui résonnait. « Mah-Ooo !». Des miaulements ou bien des sifflets. « Moh-Aoo ! ». Impossible à identifier. Nous aperçûmes soudain une énorme bestiole s’élançant devant nous depuis la cime d’un arbre. « Mais c’est un paon ! ». Je n’avais jamais croisé ces volatiles ailleurs que dans des zoos ou des jardins publics, et jamais je n’aurais pensé qu’ils pouvaient voler d’arbre en arbre. A la limite réussissaient-ils à planer quelques mètres au dessus du sol après une longue course, un peu à la manière des poules. Il y en avait partout, dans les arbres, au sol, sur le chemin. On tenta de les approcher, de les impressionner même pour les forcer à faire la roue, mais aucun d’eux n’obtempéra. Il y avait non loin une maison blanche aux volets clos, nous étions visiblement dans un jardin privé mais nous ne vîmes personne aux alentours. La demeure était charmante, tout en bois avec une frise sculptée qui courrait tout autour du toit. Un troupeau de zébus pâturait non loin de là. Nous n’étions pas franchement rassurés à l’idée d’approcher les bovins, d’autant que deux petits curieux s’avançaient vers nous. Nous finîmes par atterrir devant le portail de la propriété qui était clos. Il y avait quelqu’un au bout du chemin, probablement l’homme engagé pour garder la maison. Nous retournâmes rapidement vers la plage.

plage du sud sri lanka

Les plages du sud

Sur la côte sud, chaque plage ou presque était un enchantement. Celle de Tangalle semblait encore plus belle qu’à Mirissa. Le houle venait fouetter la petite crique dorée bordée de cocotiers et de frangipaniers. Mais c’était un peu l’histoire de toute la côte sud du pays. Nous avions fait connaissance avec le patron de la pension d’en face, essentiellement parce qu’il faisait des pizzas dans son four à pain et que l’envie d’avaler quelque-chose d’autre que du riz, des currys et des papadams était devenue plus forte que tout. Il s’était vanté de faire les meilleures pizzas du coin, selon une recette obtenue d’un ami italien. Dans la conversation, on lui demanda s’il savait où l’on pouvait trouver des Marlboro, tant qu’à faire, nous avions déjà les pizzas, pourquoi pas les cigarettes. Il nous demanda d’attendre à notre table en nous disant qu’il connaissait peut-être quelqu’un en ville. Il revint une demi-heure plus tard et nous invita à le suivre. Il démarra son triporteur dans lequel on s’installa après qu’il est fait demi tour dans l’allée. Il nous conduisit jusqu’au centre-ville de Tangalle et s’arrêta devant une petite épicerie, la seule encore ouverte à cette heure. Il nous demanda d’attendre à l’extérieur pendant qu’il négociait avec le patron. Les Marlboro étaient rares au Sri Lanka, une histoire de licence trop onéreuse. Il était toujours compliqué de s’en procurer, mais ce soir-là, on aurait pu se croire dans un film, en pleine recherche de cocaïne.

Au petit matin les éléphants

Quatre heures trente du matin, quelque part à Tangalle

Le lendemain, un mini van était venu nous chercher à l’entrée de l’hôtel pour nous transporter jusqu’à Embilipitiya, à une quarantaine de kilomètres au nord, en direction du parc national d’Uda Walawe. Une fois de plus, je n’avais presque pas dormi et j’étais ce matin d’une humeur de chien. Je râlais pendant toute la durée du trajet. « Mais quelle idée de se lever à cette heure-ci pour aller voir des animaux dans un zoo ! Autant se taper la réserve africaine de Sigean ! ». Évidemment, mes amis étaient morts de rire et ne manquèrent pas de se foutre de moi, certainement à raison. Au bout d’une heure de route, on nous déposa à la sortie du village pour embarquer dans une espèce de grosse jeep. On s’installa dans la remorque arrière, où avaient été bricolés des bancs fixés directement sur la carcasse de la voiture. Une simple bâche nous protégeait du vent et comme le soleil n’était pas encore levé, on gelait littéralement. Si le patron de l’hôtel avait pris la peine de nous prévenir, j’aurais au moins enfiler un pantalon, ne serait-ce que pour le trajet.

La route longeait un grand réservoir alors que l’aube colorait le ciel de rose pastel. La voiture ralentie à la vue d’un éléphant qui promenait au bord de l’eau. La mauvaise humeur du matin se dissipa en une fraction de seconde. Exit les remarques idiotes sur le tourisme et ses attractions stupides. Je ne voyais plus que le pachyderme, un monument sur pattes qui se déplaçait lentement, sans un bruit, majestueux, laissant sa trompe se balancer d’arrière en avant.

jeep parc uda walawe

Les paysages d’Uda Walawe n’avaient rien de semblable avec le reste du pays. Nous étions dans une gigantesque plaine aride, où la plupart des arbres de dépassaient pas un mètre cinquante. Certains étaient totalement dépourvus de feuilles à cette époque de l’année, peut être victime d’un groupe d’éléphants affamés. Un paysage désolé qui me rappelait fortement ceux filmés par Vimukthi Jayasundara dans sa Terre Abandonnée.

elephants parc uda walawe

A l’entrée du parc, toutes les craintes que j’avais eues en venant ce matin resurgirent d’un seul coup. Il y avait plus d’une quinzaine de jeeps qui attendaient leurs passagers, si bien que le départ se fit à la queue leu-leu. Mais après une vingtaine de minutes, nous fûmes bientôt seuls dans la réserve. Et les éléphants d’Uda Walawe ne tardèrent pas à se faire voir, quelques solitaires au départ, puis de petites hordes, 3 ou 4 individus pas plus, des mères avec leurs petits. Il n’en fallait pas plus pour que nous soyons conquis. Je crois bien que c’était la première fois de ma vie que je voyais des pachydermes à l’état sauvage. J’en avais bien croisé en Thaïlande, ceux sur le dos desquels grimpent les touristes pour partir en balade. On débouchait après une petite heure au bord d’un étang où s’étaient donné rendez-vous un troupeau entier de buffles, venus s’abreuver et se baigner pour se rafraîchir. On prit la pause sur un rocher le long de la berge, avant de repartir vers la sortie du parc.

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2 Comments

  1. SocheekExpat
    7 mai 2016 @ 11:03

    Ton anecdote sur les paons me fait rire car comme toi je n’imaginais pas qu’ils pouvaient voler!! Je les imaginais à peine survolant le sol!!! Alors voler d’arbre en arbre..!
    Quant aux éléphants cela doit être un sacré souvenir.

    Reply

  2. Emilie
    22 juin 2017 @ 12:16

    Un de nos meilleurs souvenirs !

    La bise,

    Emilie / clichesdailleurs.com

    Reply

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