Impressions de mon voyage à Hanoi

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A l’aéroport d’Hanoi, nous sommes encore tombés sur un fada de la route. Le minibus file à toute allure, alors que le chauffeur joue du klaxon à outrance. Sur l’autoroute, il colle, tente de doubler puis s’énerve. Maintenant il sert à gauche, puis à droite, impatient, pressé. Nous somme assis dans le coffre du van Toyota, je ressens dans le bas de mon dos le moindre petit trou sur la route. On nous dépose au niveau du parc Lenine, à deux pas de l’ancien quartier français. Depuis ce matin, je suis agacé, mal réveillé, je n’ai plus de patience. Fatigué d’attendre, d’être entre deux, de toujours avoir à bouger. Pourtant le rythme est moins soutenu que durant mes autres voyages. Je voudrais juste du calme, quelque chose de tranquille, arrêter d’aller vite, de courir d’une étape à l’autre. Se lever, visiter, balader, changer d’hôtel, dormir et repartir encore. C’est tout le dilemme du voyageur. Tout voir ou pas. Rester mais avoir l’impression de passer à côté de quelque chose. Se demander si on a fait le bon choix.

Blues à Hanoi

Je me sens comme un oiseau en cage sur le petit balcon de l’hôtel Indochina Queen II, situé au 67 Thuoc Bac Street à Hanoï. La rue a fini par se vider entièrement de ses passants. Il ne reste plus qu’un vieillard au polo rose, appuyé sur la selle d’un scooter. Une bruine légère chatouille mes pieds nus, alors que quelques enfants crient depuis le fond d’une cour d’immeuble. Au carrefour de Hang But, les charriots de ramassage des ordures sont pleins à craquer de déchets en tout genre. Plastiques, canettes et restes de repas dégageant une puanteur épicée et fermentée, qui me saisit le nez. Les feuilles du grand micocoulier paraissent jaunies à la lumière blafarde des réverbères. Il y a des plantes en pot à toutes les fenêtres, et un bougainvilliers tout en fleurs commence à grimper juste sous mon balcon.

quartier corporations hanoi

J’ai envie de voir cette ville que j’ai tant de fois rêvée, juste parce que tout le monde m’avait dit à quel point elle était fascinante, pleine de vie, empreinte d’histoire. Mais bizarrement à cet instant, je ressens aussi cette envie irrépressible de me retrouver chez moi, au calme, loin du bruit des klaxons, des gens qui crient, de la chaleur humide et de l’atmosphère pesante des grandes villes. Je suis dans une sorte d’attente, déçu par cet endroit où je viens d’atterrir, lassé d’attendre que le charme opère. Parce-que c’est l’une des grandes caractéristiques du Vietnam, les choses ne sont pas simples, elles n’arrivent pas toutes seules, presque servies sur un plateau comme dans d’autres pays d’Asie du Sud Est.

La bière et le coupe ongle

Fin d’après-midi. Nous buvons une bière dans un bia hoi à l’angle de Cua Dong et Hang Ga. 20000 dongs la pinte, pas de la grande bière, mais elle se boit quand même. De toute manière, je crois que je n’aime pas vraiment cela, la bière. Une vieille femme nous accoste avec tout son attirail de babioles pour touristes. Peut-être intéressé par un petit coupe ongle. Mais la bonne femme en voudrait 80000 dongs, une somme énorme, carrément plus cher qu’en France. On en propose 25000, mais elle refuse net évidemment. Elle nous dévisage en faisant la grimace. Il ne faut pas broncher, mais cette fois-ci nous le prenons plutôt à la rigolade. La femme rigole aussi. 25000 ! Non ! Elle refuse, nouvelle grimace, elle propose 30000 dongs. 25000 ou rien. Elle rigole encore, jaune cette fois-ci. Elle cèdera après 10 minutes…

Dans les rues de la vieille ville

Etrange mélange que cette vieille ville d’Hanoï, à tel point que je ne sais plus vraiment quoi en penser. Les trottoirs sont envahis de petites cuisines de poupées dégoutantes, qui débitent toute la journée des phô préparés avec de la viande déjà presque cuite par le soleil. Il s’en dégage des odeurs tantôt alléchantes, tantôt repoussantes, si bien qu’on hésite à s’arrêter pour goûter. Et en même temps les ruelles du quartier des 36 rues et corporations ont un charme fou, avec leur petits trottoirs pavés recouverts de tables de dinette colorées, pleines à craquer de clients à n’importe quelle heure du jour. Son petit air désuet, ses maisons d’une autre époque, l’animation des magasins, la foule compacte qui déambule sur les trottoirs. On mange et on boit presque à même le sol, dans un voile de gaz d’échappements, pendant que les vieilles vendeuses nettoient les couverts dans de petites bassines en plastique, au beau milieu de la rue. Les trottoirs sont recouverts d’ordures et de reste de soupes. Choux, citronnelle et morceaux de gras de porc. Au même instant, les ca phe et les bia hoi se sont remplis de jeunes vietnamiens, surtout des hommes, qui discutent et rigolent sous le regard des nombreux badauds. Et toute la ville qui circule en scooter, des milliers de véhicules qui se croisent et s’entrechoquent presque à chaque carrefour. Une armée de fourmis au combat, presque au coude à coude, qui tente de rejoindre je ne sais quel autre quartier de la ville. Et les rues qui s’imbriquent comme dans un jeu de Lego, avec de vieilles maisons étroites, des tours d’immeubles de la largeur d’une porte. Plus de place nulle part. Un bâtiment en soutient un autre, lequel est coincé entre deux boutiques, elles encore tellement étroites que l’on se demande comment on y pénètre. On a construit cette ville comme un jeu de cube grandeur nature. Les vieilles bâtisses du temps des colonies de se distinguent même plus du reste de la ville.

boutique 36 corporations

Et puis il y a toutes ses boutiques, parfaitement identiques de ce quartier des corporations, presque une aberration. Dans cette rue on ne vend que des rouleaux de scotchs, dans une autres des serrures et des cadenas, et dans celle-ci des emballages en papier. Je regarde tous ses pauvres vendeurs à la mine déconfite qui patientent, parfois pendant des heures, les fesses posées sur un petit tabouret rouge, attendant les clients qui ne viendront peut-être jamais.

Sur les trottoirs du périphérique, les vieillards jouent aux échecs et l’on vend des bouquets d’oeillets jaunes et de flamboyants, encore chargés à l’arrière de scooters. Une passerelle mène de l’autre côté de la voie rapide, dans un petit quartier à l’abris du regard des touristes. Ici plus de trottoirs, ni d’allées arborées pour cacher la misère. On vend à même le bitume toute sorte d’aliments, poissons, viandes, pains et légumes, recouverts d’une nuée de moucheron. L’atmosphère devient vite pesante, on nous dévisage comme si l’on arrivait de la troisième dimension. Certains paraissent prêts à vous sauter dessus ou même à vous égorgez pour une poignée de dongs. Ambiance électrique qui devient presque menaçante lorsque nous atteignons les berges du Fleuve Rouge, à l’endroit où des gamins jouent au football. Un bouchon utilisé comme projectile nous atterrit juste sous le nez. Nous rebroussons chemin en vitesse.

cote periph hanoi

A la recherche du Glamour Café

Fin de journée à Hanoï, sous un crachin huileux et poisseux, à la recherche d’un sac, dans les ruelles d’une vieille ville soudain devenue labyrinthique. Même façades décrépies, petits immeubles tubes à la silhouettes de soldats staliniens, debout, figés, tous façonnés dans le même moule. Alignement infinies de petites cuisines et de boutiques écrabouillées comme des boites à sardines. Toutes les mêmes encore, si bien qu’on ne sait plus si on les a vu la veille, ou cinq minutes plus tôt. Ce temple de l’autre côté de la rue, je le reconnais, nous y sommes venus hier. Tu te souviens de cette boutique là-bas, nous l’avons déjà vue j’en suis sûr ! Et voici le lac Hoan Kiem, encore. Nous tournons en rond, cherchant désespérément un petit bar qui porte le nom de Glamour Café. C’est juste là, après le prochain carrefour ! Cherche encore, tu vas trouver ! Et toujours pas de magasins de sacs visiblement, tant pis.

vendeur hanoi

Voilà enfin Hong Buôm et son petit café fleuri, traversé d’un tronc d’arbres et d’où résonne des airs de deep techno. Il y a toujours la même petite serveuse avec ses bigoudis dans les cheveux, et dans le fond de la salle, les deux amoureux qui roucoulent sur un tabouret, entre deux tournées de rhum. Ils nous observent d’un regard malicieux lorsque nous shazamons l’un des morceaux qui tourne en boucle. « Tout à l’heure je vous dirai ! » nous lance la serveuse d’un air amusé. « One more round, please ! » Encore une tournée de rhum à 30000 dongs. Pas d’alcool dans ses verres, répète-ton. Et pourtant j’ai déjà la tête qui tourne plus que de raison. On rigole pour presque rien. Une heure déjà que nous sommes attablés à la terrasse du bar. Ou peut-être deux, en fait beaucoup plus, nous n’en savons même rien. « Encore une tournée, vous êtes sûr ? Parce que c’est la septième ! » nous rappelle le serveur alors que l’on commence déjà à plier la terrasse… Le voyage à Hanoi devient plus que flou, il est temps de rentrer.

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10 Comments

  1. Marine
    26 novembre 2015 @ 3:15

    J’aime la manière dont vous décrivez l’ambiance d’Hanoi à travers votre récit. Ça devient rare de voir les gens écrire sur leurs voyages, et c’est un vrai plaisir de vous lire.
    Bonne journée
    Marine

    Reply

    • Petits Voyageurs
      26 novembre 2015 @ 10:28

      Merci Marine pour votre retour, en même temps Hanoi est une source d’inspiration sans limite ! Ravi que ma manière d’écrire vous est touchée ! C’est vrai qu’il y a énormément de blogs de voyage aujourd’hui, mais j’en connais quelques autres qui sont vraiment très bien écrits aussi (voire même mieux que le mien) !

      Reply

  2. Annie
    27 novembre 2015 @ 10:18

    Merci pour ce partage ! Ma fille vit à Hanoï depuis maintant 18 mois et ses récits ressemblent au vôtre. Avec les couleurs, les odeurs , le bruit omniprésent. Rien ne m’attirait de ce côté là du globe mais depuis que ma fille me parle du Vietnam et de ses” richesses” j’ai vraiment envie d’y aller et pourquoi pas faire un tour du côté du Cambodge et de la Thaïlande… en backpack bien sûr !!

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    • Petits Voyageurs
      27 novembre 2015 @ 11:17

      Merci Annie pour votre retour ! Je ne peux que vous conseiller de découvrir l’Asie du Sud Est, pour laquelle j’ai eu un vrai coup de coeur ! Je ne connais pas encore le Cambodge. J’ai une préférence pour le Vietnam, comparé à la Thaïlande, même si ce sont deux pays très différents ! Et le nord du pays est vraiment magnifique. En plus si votre fille vit là-bas, c’est une vraie opportunité pour découvrir le pays ! En espérant que ce sera pour bientôt !

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  3. Parfum d'Automne
    27 octobre 2018 @ 5:53

    Un témoignage qui a le mérite d’etre sincere! haha

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  4. SoMuchPoker
    26 avril 2019 @ 8:53

    Super article, ca donne envie!

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  5. Téo Odyssée
    19 juin 2019 @ 8:32

    J’aime beaucoup le ton à la fois simple et profond de votre écriture Paul. Ça fait plaisir de voir qu’on parle du Vietnam d’une manière un peu différente. Je vous invite à découvrir notre site internet, qui essaie lui aussi de présenter ce pays sur un style plus littéraire. Bonne continuation à vous !

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  6. LesMichels
    16 juillet 2019 @ 5:27

    Belle étape ! On vous paie la 8ème tournée si vous revenez au Vietnam 😉

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  7. Dung Saigon
    16 novembre 2020 @ 6:45

    le vietnam est toujours un pays intéressant pour voyager, vous devriez passer plus de temps dans le nord de Hanoi, plutôt cool pour faire du tourisme là-bas

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  8. Van Thai Nguyen
    22 novembre 2021 @ 4:03

    Hanoi est une ville qui demande de la patience pour se faire accepter par les habitants. Ce n’est pas une ville adaptée aux touristes hâtifs qui cherchent l’authenticité jetable dès le premier coup. Comme toute métropole, Hanoi a a personnalité forte que l’on aime ou déteste. Pour l’aimer, il faut un peu de persévérence et d’empathie. N’oublions pas, c’est le visiteur qui doit faire les premiers pas pour comprendre l’hôte et pas l’inverse.

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