Vers midi, nous nous rendons à la gare pour emprunter le train dans les montagnes du Sri Lanka. Celui qui relie Ella à Kandy. La halte a été courte, une journée et demi à peine. Ce matin encore, nous nous promenions au milieu des plantations de thé sur le chemin de mini Sri Pada. Nous n’avons malheureusement pas le temps de nous attarder ici. Dans quelques jours nous avons rendez-vous avec des amis à Colombo et nous voulons faire une pause à Nuwara Eliya avant de redescendre dans la plaine.
Nous pressons le pas, le train part dans une vingtaine de minutes et il faut encore remonter toute la côte qui mène à la gare. Un petit train bleu s’arrête à quai.
Nous redescendons la montagne avec lenteur à travers une région vallonnée où les hommes cultivent des légumes en terrasse. Le ciel s’assombrit progressivement alors que le chemin de fer reprend de la hauteur, peu après Dhiyatalawa. Le train traverse d’immenses plantations de thé qui quadrillent entièrement les montagnes environnantes. Tout autour de nous, les théiers prennent d’innombrables tons de verts au rythme du passage des nuages.
La brume descend lentement du ciel jusqu’à envelopper les racines des arbres. On y voit plus rien. La température semble avoir soudain chuté de plusieurs degrés. Impression de fin d’automne sur les montagnes d’Horton Plains. Petites maisonnettes en taules colorées, linges pendus sur de longs fils traversant les jardins malgré la pluie, jeunes femmes abritées sous leur parapluie qui regardent passer le train. La vie dans les montagnes défile lentement sous mes yeux. J’ai le nez collé à la vitre du train toute embuée, essayant tant bien que mal d’observer le paysage. La pluie tombe maintenant à torrent, au loin, d’immenses cascades toutes noires de boue déchirent la montagne. En contrebas de la voie, il ne reste plus que des souches d’arbres à côté des quelles gisent d’énormes branches probablement arrachées par la dernière tempête.
Nous arrivons à Nanu Oya après trois heures de voyage, sous une pluie battante. Nous attrapons directement un triporteur à la sortie de la gare et prenons la direction de Nuwara Eliya. Le véhicule slalome sur de petites routes défoncées dont certaines n’ont même plus de revêtement. Des nids de poules ont finit par se former un peu partout si bien que le chauffeur doit se livrer à de nombreuses manœuvres pour poursuivre sa route.
On atteint l’entrée de Nuwara Eliya quelques kilomètres après la plantation Pedro. Nous arrivons bientôt au niveau du parc de la reine Victoria et continuons sur Park Road jusqu’à notre pension, réservée à la va-vite sur internet.
Nuwara Eliya était une station climatique très prisée de la haute société cinghalaise dans les années 1920. « C’était un monde différent. Là-bas, à deux mille mètres, les attendaient des fêtes, des courses de chevaux, le tournoi de tennis de Ceylan ou des parties de golf acharnées » (Un Air de Famille, Michael Ondaatje). Dès que les grosses chaleurs ou la mousson envahissaient les plaines de la région de Colombo, les familles bourgeoises de tout le pays affluaient dans les régions montagneuses, principalement ici ou à Kandy.
Aujourd’hui il ne reste pas grand chose de cette splendeur d’antan. Toute au plus quelques grandes demeures et des hôtels luxueux disséminés en périphérie de la ville. Le centre de la ville est encombré et défraîchi, il déborde d’échoppes, de restaurants et de supérettes pour voyageurs. Nous passerons la nuit et demain, retour à Kandy.
Huit heures cinquante à la gare de Nanu Oya. Un vieux train rouge, toutes voitures bondées, entre en gare. La foule se rue vers les portes ou même les fenêtres, ça crie, ça bouscule. A l’intérieur c’est encore pire, nous parvenons à trouver une petite place près d’une fenêtre dans le wagon restaurant qui ressemble à une boîte à sardines. C’est un peu l’horreur, il fait une chaleur insoutenable. Un homme aux dents rouges, tachées de bétel, ne me lâche plus depuis au moins une heure. Je ne vois plus que sa gueule et ses dents qui mastiquent d’une manière frénétique.
Nous descendons peu avant Kandy pour changer de train. Des cris, des chants et de la musique résonnent dans toute les voitures. Ce week-end est à la fois jour de poya et d’anniversaire du prophète. Tout le monde a pris son week-end, occasion de descendre dans les plaines ou vers Colombo pour la Perahera.
Après presque quatre heures de voyage, nous voilà enfin à Kandy. Quatre longues heures pour soixante quinze kilomètres tout au plus.
« Kandy : une avenue montante, un lac, une pagode sacrée, des îlots de bambous, des allées d’essences merveilleuses, des collines où la lumière pousse en gerbes fauves, s’éparpille en vertes chevelures, se condense en fûts rouilles, se déploie en éventails, s’aiguise en fers de lance, retombe en pluie, s’épanouit en fleurs ». (André Bellessort, Une promenade à Ceylan, Revue des deux mondes, 1899)
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Un train dans les montagnes du Sri Lanka
Vers midi, nous nous rendons à la gare pour emprunter le train dans les montagnes du Sri Lanka. Celui qui relie Ella à Kandy. La halte a été courte, une journée et demi à peine. Ce matin encore, nous nous promenions au milieu des plantations de thé sur le chemin de mini Sri Pada. Nous n’avons malheureusement pas le temps de nous attarder ici. Dans quelques jours nous avons rendez-vous avec des amis à Colombo et nous voulons faire une pause à Nuwara Eliya avant de redescendre dans la plaine.
Nous pressons le pas, le train part dans une vingtaine de minutes et il faut encore remonter toute la côte qui mène à la gare. Un petit train bleu s’arrête à quai.
Nous redescendons la montagne avec lenteur à travers une région vallonnée où les hommes cultivent des légumes en terrasse. Le ciel s’assombrit progressivement alors que le chemin de fer reprend de la hauteur, peu après Dhiyatalawa. Le train traverse d’immenses plantations de thé qui quadrillent entièrement les montagnes environnantes. Tout autour de nous, les théiers prennent d’innombrables tons de verts au rythme du passage des nuages.
La brume descend lentement du ciel jusqu’à envelopper les racines des arbres. On y voit plus rien. La température semble avoir soudain chuté de plusieurs degrés. Impression de fin d’automne sur les montagnes d’Horton Plains. Petites maisonnettes en taules colorées, linges pendus sur de longs fils traversant les jardins malgré la pluie, jeunes femmes abritées sous leur parapluie qui regardent passer le train. La vie dans les montagnes défile lentement sous mes yeux. J’ai le nez collé à la vitre du train toute embuée, essayant tant bien que mal d’observer le paysage. La pluie tombe maintenant à torrent, au loin, d’immenses cascades toutes noires de boue déchirent la montagne. En contrebas de la voie, il ne reste plus que des souches d’arbres à côté des quelles gisent d’énormes branches probablement arrachées par la dernière tempête.
Nous arrivons à Nanu Oya après trois heures de voyage, sous une pluie battante. Nous attrapons directement un triporteur à la sortie de la gare et prenons la direction de Nuwara Eliya. Le véhicule slalome sur de petites routes défoncées dont certaines n’ont même plus de revêtement. Des nids de poules ont finit par se former un peu partout si bien que le chauffeur doit se livrer à de nombreuses manœuvres pour poursuivre sa route.
On atteint l’entrée de Nuwara Eliya quelques kilomètres après la plantation Pedro. Nous arrivons bientôt au niveau du parc de la reine Victoria et continuons sur Park Road jusqu’à notre pension, réservée à la va-vite sur internet.
Nuwara Eliya était une station climatique très prisée de la haute société cinghalaise dans les années 1920. « C’était un monde différent. Là-bas, à deux mille mètres, les attendaient des fêtes, des courses de chevaux, le tournoi de tennis de Ceylan ou des parties de golf acharnées » (Un Air de Famille, Michael Ondaatje). Dès que les grosses chaleurs ou la mousson envahissaient les plaines de la région de Colombo, les familles bourgeoises de tout le pays affluaient dans les régions montagneuses, principalement ici ou à Kandy.
Aujourd’hui il ne reste pas grand chose de cette splendeur d’antan. Toute au plus quelques grandes demeures et des hôtels luxueux disséminés en périphérie de la ville. Le centre de la ville est encombré et défraîchi, il déborde d’échoppes, de restaurants et de supérettes pour voyageurs. Nous passerons la nuit et demain, retour à Kandy.
Huit heures cinquante à la gare de Nanu Oya. Un vieux train rouge, toutes voitures bondées, entre en gare. La foule se rue vers les portes ou même les fenêtres, ça crie, ça bouscule. A l’intérieur c’est encore pire, nous parvenons à trouver une petite place près d’une fenêtre dans le wagon restaurant qui ressemble à une boîte à sardines. C’est un peu l’horreur, il fait une chaleur insoutenable. Un homme aux dents rouges, tachées de bétel, ne me lâche plus depuis au moins une heure. Je ne vois plus que sa gueule et ses dents qui mastiquent d’une manière frénétique.
Nous descendons peu avant Kandy pour changer de train. Des cris, des chants et de la musique résonnent dans toute les voitures. Ce week-end est à la fois jour de poya et d’anniversaire du prophète. Tout le monde a pris son week-end, occasion de descendre dans les plaines ou vers Colombo pour la Perahera.
Après presque quatre heures de voyage, nous voilà enfin à Kandy. Quatre longues heures pour soixante quinze kilomètres tout au plus.
« Kandy : une avenue montante, un lac, une pagode sacrée, des îlots de bambous, des allées d’essences merveilleuses, des collines où la lumière pousse en gerbes fauves, s’éparpille en vertes chevelures, se condense en fûts rouilles, se déploie en éventails, s’aiguise en fers de lance, retombe en pluie, s’épanouit en fleurs ». (André Bellessort, Une promenade à Ceylan, Revue des deux mondes, 1899)
(suite à venir…)
Au sud du Sri Lanka, entre Talalla et Matara
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