Une histoire de dent, à Kandy

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A Kandy

Le minibus intercity file à pleine vitesse sur la route qui remonte la montagne depuis Matale. Je suis accroché à mon siège et j’observe la valse des passagers. A Ambatenna, une vielle femme monte à bord. Elle prend la place d’une jeune fille en sari, qui pique le siège d’un vieillard, qui lui déplie un strapontin. De vingt places on en fait trente, on entasse, on empile, on compresse jusqu’à occupation complète. Je ne sais pas combien de temps le pauvre minibus supportera le voyage, d’autant que le chauffeur ne lui fait pas de cadeau. En pleine côte il double un bajaj qui double un bus alors qu’en face, un camion arrive à toute vitesse. Ça se joue au klaxon, à la vitesse, à la soi disant habilité du conducteur. Ou peut être à la chance.

Voici enfin les faubourgs de Kandy, mais dans la circulation plus qu’intense de la ville, les choses à nouveau se compliquent. Recommence un jeu sans fin de chaises musicales pour laisser descendre les passagers à mesure qu’on approche du centre. L’autocar nous arrête sur ce que l’on a décrété être la gare routière de la ville. Juste un endroit où la route est un peu plus large qu’ailleurs, avec des dizaines de bus qui stationnent, tournent ou klaxonnent. On crie, on court, on évite. Nous nous pressons vers je ne sais où, peu importe, pourvu qu’on fuit enfin cette cohue.

Une pension sur la colline

Nous logeons à la pension qui porte le nom de Hills Lodge, dans les hauteurs. Grande demeure néo coloniale flanquée au fond d’une allée défoncée que même les chauffeurs de triporteurs de la ville ne semblent pas connaître. Ou alors est-ce encore une astuce pour gagner plus d’argent. La maisonnée est tenue par un petit homme prénommé Kumar. Ses dents s’entrechoquent sous sa moustache et son nez est surmonté de petites lunettes rondes. Il a toujours une tenue impeccable qui lui donne un petit côté british. Il nous invite à consulter le livre d’or de la pension en insistant sur les pages écrites en français, probablement dans le seul but de se faire mousser. Il organise nos journées à notre place, il planifie pour nous un tour de Kandy avec un triporteur privé pour un prix, selon lui, bien moins cher que ceux de la ville. Et nous voilà partis au petit matin, sans avoir trop le choix. D’abord une fabrique de thé, puis les jardins royaux. Un temple sur les hauteurs avant de finir au Sri Dalada Maligawa.

Rues de Kandy
Rues de Kandy

Le musée du thé

La fabrique de thé est en fin de compte un musée, situé à quelques minutes à peine du Hills Lodge. Une jeune femme classement vêtue d’un sari couleur bleu turquoise nous accueille. Elle paraît gênée, elle nous regarde en souriant avec ses grands yeux noirs. Nous pénétrons dans une première salle remplie d’anciennes machines servant à la fabrication du thé. Elle nous confie alors que nous sommes ses « premiers invités ». Je ne comprends pas tout de suite. Elle accompagne seule des visiteurs pour la première fois nous dit-elle. Elle sourit plus fort, nous fixant encore avec ses grands yeux noirs. Je ne vous ferais pas de compte-rendu complet de cette visite qui, avec le recul, n’avait que peu d’intérêt. Quelques vielles machines, une maquette, la photographie de Sir Thomas Lipton. Le jeune femme demande sans cesse si tout se passe bien, je sens une pointe de stress. Nous blaguons pour essayer de détendre l’atmosphère. Elle s’applique à tout bien expliquer, de façon trop scolaire peut-être, mais qu’importe. Elle nous laisse sous les combles, dans la partie supérieure du musée, où nous pourrons déguster un tasse de thé.

Jardins royaux

Les jardins de Peredaniya sont tout ce qu’il reste de l’ancienne cité royale de Kandy. Le reste à disparu, détruit par le dernier roi devenu fou, puis par les anglais lors de la prise de la ville. A l’entrée, on ne cache même pas que les étrangers paieront presque dix fois plus cher. C’est la même chose dans tout le pays. Un couple prend la pause pour des photographies de mariage. Ils sont richement vêtus. La femme porte une longue robe blanche en dentelle et tient dans la main droite une gerbe de fleurs blanches. Lui porte la tenue traditionnelle, elle lui donne l’allure d’un toréro. Nous marchons dans les allées du parc jusqu’à atteindre une prairie au milieu de laquelle pousse une gigantesque figuier de Java. Il recouvre une superficie de plus de 2500 mètres carré. Une serre abrite une collection incroyable d’orchidées. Deux heures passent, nous repartons pour la ville.

Jardins de Peradeniya
Jardins de Peradeniya

Une histoire de dent

Je repense à Kandy, la « petite ville » près du lac. Ses rues centrales pleines de vie, ses vielles devantures décaties d’où la peinture s’écaille. Plus de couleurs, juste le vert de la moisissure et cet espèce de beige poussière. Et pourtant le charme est là, le temps n’y fait rien. L’énergie de la foule, la couleur des étals, la folie dans les vitrines des nombreuses pâtisseries de la rue principale. Nous y sommes venus comme tout le monde, parce qu’on nous a raconté cette histoire de dent. Celle qui appartenait à Bouddha et qu’on enferma dans un boîte, puis dans une autre et encore une autre. Boîte que l’on mit à l’abri à l’intérieur d’un reliquaire richement décoré. Bien caché au cœur d’un temple que l’on surnomma Temple de la Dent ou Sri Dalada Maligawa.

Temple de la dent à Kandy
Temple de la dent à Kandy

L’édifice en lui-même est bien moins beau que sur les photographies de mon livre. A côté du lac il paraît si petit, il n’a plus la même couleur que sur les clichés. Je suis déçu. Son intérieur nous paraît austère, sombre, du bois et des couleurs d’ébène. La lumière peine à pénétrer l’intérieur de l’édifice, si bien que nous ne remarquerons même pas le travail d’orfèvre sur les murs, les portes ou les plafonds. Dans la salle du reliquaire il y a une foule de dévots qui prient à même le sol, récitant inlassablement les mêmes prières. A l’heure de la puja du soir, d’autres affluent, la ferveur monte, ils attendent l’ouverture de la petite porte. Celle qui renferme les boîtes, ou plutôt les coffrets. Les tambours retentissent, ils résonnent dans tout l’édifice, nous sommes déjà dehors. Trop de monde et puis je ne sais pas, nous ne sommes pas dedans, la magie n’a pas opérée.

Le chauffeur nous attend près du Pizza Hut en haut de la rue principale. Il se marie ce week-end. Il en a profité pour acheter un gâteau. Il veut le ramener chez lui avant de nous déposer à la pension. Ils ont prévu une grande fête à Colombo avec beaucoup de monde. Il fait nuit, nous arrivons au Hills Lodge…

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2 Comments

  1. alaindici
    28 janvier 2015 @ 5:39

    Joli texte très agréable à lire et images de qualité. Bravo pour ce post !

    Reply

    • Petits Voyageurs
      28 janvier 2015 @ 5:56

      Merci !!! Très content que ça vous plaise ! Moi en tout cas j’ai aimé l’écrire…
      A bientôt !

      Reply

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