Voyage dans mon tiroir intérieur : chronique sous chloroquine

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A force de rester confiné, j’ai sombré jour après jour dans la chloroquine. Merci Didier, car grâce à toi, j’ai pu entreprendre l’écriture de cette chronique. C’est un genre de journal intime qui vous entraîne dans les profondeurs de mon tiroir intérieur. Jour après jour, je te raconte comment je vis mon confinement, entre rire et larmes, aventure et confiture, politique et physique quantique. Mais je te préviens, fais attention car bien souvent, la fiction rejoint la réalité. Ou alors c’est l’inverse, je ne sais plus, enfin bref…

NB : cet article a un penchant très prononcé pour la dérision et la satire. Si tu es allergique au second voire au troisième degré, passe ton chemin…

Le jour d’après : là où tout a commencé

Juste avant le confinement, j’étais en week-end aux Orres avec une bande de potes. C’était il y a un mois et demi et pourtant, j’ai l’impression que c’était il y a un siècle. Nous étions insouciants, nous étions jeunes. On faisait la fête, on picolait, on descendait les pistes tout schuss (enfin sauf moi). Et puis on a commencé à entendre des infos sur la fermeture probable des écoles, puis des bars et des restaurants et finalement de notre station de ski.

Franchement, j’ai cru à un film. Sur la route du retour, nous écoutions France Inter. La situation devenait de plus en plus alarmiste au fil des kilomètres. Et puis il y a eu cette fameuse allocution du 16 mars, le début de la fin… Ce soir-là, Emmanuel Macron clôturait son discours presque martial avec cette phrase : “Agissons avec force mais retenons cela : le jour d’après, quand nous aurons gagné, ce ne sera pas un retour au jour d’avant. Nous serons plus forts moralement, nous aurons appris et je saurai aussi avec vous en tirer toutes les conséquences.”

Le jour d’après, Manu bordel, je ne sais pas si t’as vu le film, mais alors j’espère qu’on ne va pas en arriver là ! Manquerait plus qu’une big catastrophe naturelle nous tombe sur le coin de la figure avec tout ça. Et en plus je peux te dire qu’avec Trump comme président des Etats-Unis, Jack et toute sa famille seraient morts en moins de deux. Vu son scepticisme depuis le début de cette crise, doublé du fait qu’il ne croit absolument pas au dérèglement climatique, le mec n’aurait absolument pas levé le petit doigt…

Ma rue pendant le confinement

Libère la créativité qui est en toi

Depuis le début du confinement, j’ai l’humeur qui déraille. Je passe du rire aux larmes, de l’hystérie à la dépression. Parfois, je reste de longues heures devant l’écran de mon ordi, presque amorphe, à procrastiner. Puis à ces périodes léthargiques et dépressives succèdent des sessions créatives obsessionnelles frisant parfois la folie. C’est d’ailleurs au cours de l’une d’entre-elles que j’ai écrit 75% de cet article.

Il y a 4 matins, je crois que je suis tombé dans une sorte de spirale maniaco-suicidaire qui me pousse à imaginer à la pelle des scénarios post-apocalyptiques. J’ai commencé à écrire un récit en tweet à propos de mon premier voyage en Thaïlande, dans le monde d’avant. Voici quelques morceaux choisis.

Aujourd’hui si je disais que je pars à Bangkok, on me lapiderait en place publique. D’ailleurs en écrivant ces lignes, j’ai le cœur qui palpite. Pourtant j’utilise Tails et je suis connecté derrière un VPN sur le réseau Tor…

A l’époque en 2009, voyager à l’autre bout du monde était synonyme d’évasion, d’aventure, de découverte et d’inconnu. C’était même gratifiant d’être considéré comme un voyageur. Tous les jeunes rêvaient de faire le tour de monde. Puis la machine à commencer à s’emballer.

Les voyageurs sont peu à peu devenus des millions, des milliards, il n’y avait plus de place pour tout le monde. De Bangkok à Barcelone, d’Amsterdam à Lisbonne, les touristes se sont alors transformés en paria, en verrue, en espèce à exterminer.

Mais l’oeuvre majeure de cet ouragan d’horreur créative se matérialise en un mini podcast, publié aussitôt sur Twitter et Instagram. Un simple message laissé par un inconnu (enfin moi mais chut !) sur le répondeur de sa mère. Et forcément, les choses tournent mal… L’aventure est à réécouter par ici :

Le jour où j’ai failli devenir champion du monde de fitness

Mon putain de mur Facebook est bombardé de pubs avec des mecs musclés en mode tablettes de chocolat ou des nanas qui font du fitness en legging. Et moi qui suis encore vautré dans mon canap’, à bouffer du Nutella en regardant Why Woman Kills. Bon allez, je vais télécharger une appli pour faire du sport. Ca ne peut pas me faire du mal et puis tout le monde le fait, alors je ne vois pourquoi je resterai sur le carreau. Putain de pression sociale (quand elle est digitale, elle est encore plus virulente). 

Les 10 premières applis de mon store sont payantes, enfin pas au début. Genre t’as le droit de faire 15 pompes et 20 abdos gratis, mais si tu veux rajouter des squats et du rameur, tu dois payer ton abonnement 12 mois à 50 ou 80 balles… Heureusement que Decathlon (oups pas de marque) est là. Je télécharge, j’installe, je choisi le programme “Renforcement musculaire 4 semaines – niveau débutant”. 

NB : Nous sommes le 3 mai et en un mois et demi,  je n’ai fait qu’une séance… et encore j’ai zappé deux exercices parce-que je n’avais pas le matos !

Bientôt, nous sortirons du confinement

Trop d’info tue l’info et Kim Jong Un

Je suis dans mon lit, à peine réveillé. En bas, j’entends déjà la télé ronronner. Depuis 3 semaines, les chaînes d’infos sont toutes accordées sur le même diapason. Coronavirus à 7 heures, confinement à 8 heures, service de réanimation à 9 heures, chloroquine à 10 heures, EHPAD à 11 heures, hommage aux soignants à midi. Mais bordel, il ne se passe donc plus rien d’autre sur la planète que cette saloperie de pandémie ? Ah si pardon, il y a Louis de Funès qui tourne boucle. A se demander si ce n’est pas lui qui nous a inoculer le virus, ou pire, s’il n’est pas le père caché de Didier Raoult !

Une invasion monstre de sauterelles en Afrique de l’ouest : personne n’en parle. Un incendie près de la centrale de Tchernobyl : abordé vite fait en fin de journal comme si ce n’était qu’un vulgaire barbecue qui a mal tourné. On voit passer de manière furtive des bribes d’infos aussi vite oubliées, reléguées aussi sec au fond des oubliettes des internets et de la TV. Si j’étais Kim Jong-Un, c’est maintenant que je lancerais ma fameuse attaque nucléaire. Mec, c’est open bar, personne ne fait gaffe à toi. Vas-y quoi ! 

Apparement je me suis trompé, on ne parle que de lui. Mince le pauvre, il est presque mort l’autre week-end sans avoir eu le temps de charger l’ogive… (d’après un info Gala ou Voici, enfin un truc du genre). Fort heureusement, la saga va pouvoir continuer. A défaut d’avoir succomber à son opération, paraitrait qu’il se la coule douce au bord de l’eau ! Bon, on me dit maintenant dans l’oreillette qu’il ne peut plus marcher (encore un scoop de Gala)… Affaire à suivre les amis, il faut bien s’occuper pendant le confinement !

Dans la peau de Bree Van de Kamp

Depuis 3 semaines, j’ai cette foutue impression d’être dans la peau de Bree Van De Kamp. Je passe toutes mes journées à mitonner des bons petits plats, tout en sifflant des verres de vin en scred. Je n’ai jamais vraiment eu de tendance alcoolique… euh en fait si, mais comme je suis plutôt du genre alcoolique mondain (c’est plus classe), je crois que je ne m’en rendais pas compte. 

Quand tu te retrouves seul face à toi même, tu n’as que deux solutions : l’introspection ou l’alcool. Et comme la plupart des expériences introspectives sous alcool terminent mal, tu te retrouve obligé de choisir entre l’un et l’autre. Je ne suis pas tout à fait prêt pour ce grand voyage intérieur et de toute manière avec cette psychose ambiante, je trouve que ce n’est juste pas le bon moment.

On dit que le confinement est propice à la philosophie, à l’éducation de l’esprit, à la culture, à l’enrichissement personnel. Aujourd’hui, la réflexion la plus profonde que j’ai eue consiste à savoir si chanter sous la douche est un phénomène répandu en France et surtout, pour quelles raisons. Est-ce les gouttelettes d’eau ruisselant sur ta peau qui libèrent l’artiste que tu n’as jamais été ? Est-ce l’acoustique divine de cette cabine de douche qui te pousse à la vocalise ? Je n’ai pas la réponse, mais au moins j’ai occupé mon esprit à autre chose durant 20 minutes…

Alors là, vous allez commencer à penser que nous sommes deux dans ma tête. Mais vous êtes loin du compte les gars. C’est toute une école qui squatte mon cerveau depuis 4 semaines et je peux vous jurer que chez eux, il n’y a point de confinement qui tienne.

happy-hour-montpellier

Réussir son confinement à tout prix !

Même en plein confinement, nous sommes rattrapés par les pires réflexes qu’induit notre fucking société de consommation. Partout sur la toile, à la télé, dans les médias, on nous exhorte à réussir notre confinement. Mais pourquoi et surtout pourquoi faire ? Il faut combler le vide : lire, dessiner, cuisiner, faire du pain, faire du sport. Reste chez toi mais ne reste pas à glander ! Nous sommes obligés de nous gaver de ces petits riens dont Géraldine Mosna-Savoye parle si bien dans sa chronique sur France Culture.

Je sais que je ne suis pas obligé de faire du jogging, de préparer un ragu maison pour mes lasagnes ou de lancer d’innombrables nouveaux projets sur mon blog. Et pourtant je le fais quand même, comme si mes amis virtuels, ceux avec qui je converse sur Twitter, Instagram ou Facebook, me l’intimaient telle une condition sine qua non pour survivre au confinement et ne pas basculer dans la catégorie des loosers. En fait, je suis dopé au productivisme, accroc au capitalisme et incapable de ne rien faire. Mais n’en sommes nous pas tous là ? C’est en tout cas le constat que fait un journaliste de VICE dans un article paru il y a quelques semaines…

Avant de chuter…

Face au vide, il faut combler, combler et combler encore pour vaincre l’angoisse et ne pas tomber. C’est pourtant ce qui m’est arrivé le 13 avril, lorsque notre président a annoncé la prolongation (pourtant attendue et connue depuis plusieurs jours déjà) du confinement durant encore un mois. Le lendemain, sans vraiment comprendre pourquoi, je me suis écroulé. Je me suis enfoncé dans le néant, sans plus savoir quoi faire. Je ne pouvais plus réfléchir, je ne pouvais plus avancer, je ne pouvais plus travailler, je ne pouvais rien en fait. 

Mais bien entendu, ça, je ne l’ai absolument pas ébruité sur les réseaux sociaux. Hors de question de perdre la face. J’ai continué à publier mes conneries comme si de rien n’était, à recommander je ne sais quel livre ou quel podcast. Pourtant depuis quelques semaines déjà, je n’arrivais plus à trouver le sommeil. L’insomnie devenait la passagère clandestine de mes nuits presque un jour sur deux. Je pensais être le seul, puis en discutant avec des amis, je me suis rendu compte que chacun d’eux ou presque était passé par cette phase. Pourtant sur internet personne n’en parle, comme si le sujet était tabou, comme si le problème n’existait pas… pourtant il est bien présent !

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1 kilomètre pour s’évader

1 kilomètre, c’est tout ce qu’il nous reste pour nous évader un peu. Loin de moi l’idée de me plaindre, je pense que j’ai autour de moi le plus beau kilomètre carré de Montpellier, qui est accessoirement la plus belle ville du sud mais aussi du monde ! Ok j’arrête, bon en tout cas, c’est ma soupape, le truc qui fait que je ne pète pas les plombs. Si je ne sors pas tous les jours ou tous les deux jours, même quelques minutes, je risque fort d’imploser avant la mi-mai. 

Dans ce petit kilomètre carré qu’il nous est autorisé d’explorer, il reste encore des lieux qui invitent au rêve, à l’évasion. C’est notamment le cas du jardin des plantes de Montpellier. Fondé au XVIe siècle, c’est tout simplement le plus ancien jardin botanique de France. C’est l’un des plus beaux aussi, après celui de Nantes. Et depuis la réouverture en 2018 de l’Orangerie et de la partie haute du parc fermée depuis plus de 10 ans, ce jardin urbain m’offre une halte verte et réconfortante, même si je ne peux aujourd’hui l’admirer que depuis le parapet.

Et puis il y a aussi la cathédrale Saint-Pierre, un chef-d’oeuvre du gothique méridional. Je ne sais pas si tu t’es déjà promené sur son parvis, au pied des piles monumentales qui soutiennent son porche en baldaquin. Franchement, c’est assez impressionnant…

Il y en a ras le bol des défis !

#MeAt20, poste la 7ème photo de ta bibliothèque, teste tes connaissances de véritable Alsacien, on vient encore de m’inviter à participer à un énième challenge sur les réseaux sociaux. Mais je ne peux pas la publier cette photo de moi à 20 ans, bordel ! La seule qu’il me reste, c’est un cliché pris en after à 8’ du mat. Autant te dire que je n’ai pas trop envie de garder cette image de moi dans les annales. 

La septième photo de ma bibliothèque, non plus. J’ai essayé de faire deux ou trois selfies lors du dernier apéro Zoom avec les potes. Alors forcément, bah non quoi, je n’veux pas la montrer non plus. Par contre le test sur l’Alsace (je l’ai fait quand même hein, comme vous d’ailleurs), je l’ai plutôt bien réussi. Mais comme tout le monde s’en fout, j’ai gardé le résultat pour moi (1 petite faute de rien du tout).

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Faussaire ou youtubeur, mon cœur balance

La semaine passée dans le Sens de la Visite, j’ai écouté une entrevue passionnante avec Guy Ribes… et d’un coup je me suis dis : pourquoi pas moi ? Sur Youtube, j’ai déniché une de ces vidéos géniales qui te promets de réussir à reproduire la nuit étoilée de Van Gogh en seulement 4 petits conseils. Malheureusement, à cause du confinement, je ne peux acheter ni châssis, ni toile, ni pinceau. Voilà encore une carrière fulgurante tuée dans l’oeuf ! 

J’aime Youtube, tu y trouves vraiment tout ce que tu veux. Vous pensez qu’il n’existe pas pire que la télévision ? Passez une journée entière à flâner sur Youtube et vous verrez… il y a de véritables perles. Et c’est le gros problème de cette plateforme : les vrais créatifs sont éclipsés au profit d’un ramassis de conneries et de vidéos snack virales, remplies de fake news et de fausses promesses. Il n’y a qu’à cliquer sur les tendances pour se faire une idée : “J’ai acheté 350 banshee de collection”, “Mon père devine le prix de mes vêtements”, “J’ai laissé repousser mes sourcils après les avoir rasé pendant 3 ans”,… Je pourrais continuer comme cela des heures durant. Bon allez, je vais me coucher !

En attendant le déconfinement

Plus que 8 jours à attendre, 8 petits jours. Enfin seulement si vous êtes sages les enfants. Et si vous croyez encore que le monde d’après va changer, je vous suggère de regarder la dernière pub Ikéa… c’est édifiant !

Bon dimanche au soleil…

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1 Comment

  1. Ophélie G.
    5 mai 2020 @ 5:21

    Excellent cet article ! J’espère que malgré tout, tu gardes le moral. (J’écris ce commentaire depuis mon canapé, une boîte de cookies chocolat/beurre de cacahuète à portée de mains – les applis de sport ne se sont même pas frayé un chemin jusqu’à mon smartphone). Bonne soirée ! xx

    Reply

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